Hubert Reeves

Hubert Reeves Hubert Reeves

Conseiller scientifique à la NASA Institute for Space Studies, New York, 1960-1964.
Directeur de Recherches au Centre National de la Recherche Scientifique, Paris, 1965. Sujets de recherches au Service d’Astrophysique de Saclay : origine des éléments chimiques, origine du système solaire, origine de l’univers, astrophysique nucléaire, cosmologie.
Professeur Associé au Département de Physique de l’Université de Montréal.
Président de l’association Humanité et Biodiversité.
Auteur de nombreux ouvrages.

 

Extrait de mon Manifeste pour une Justice Climatique :

« Chaque rencontre avec Hubert Reeves vous laisse un sentiment paisible.

Il y a d’abord le charisme d’un homme qui se demanderait, comme l’écrivait Victor Hugo dans « Booz endormi », « Quel Dieu, quel moissonneur de l’éternel été / Avait, en s’en allant, négligemment jeté / Cette faucille d’or dans le champ des étoiles ».

Il y a ensuite la silhouette, l’allure, celle d’un promeneur solitaire aux multiples rêveries.

Puis la voix, inimitable, qui roule les r, et enroule les uns aux autres les concepts et les éblouissements, puis le regard, où affleurent l’intelligence des choses et des gens, la douleur, aussi, parfois, d’une inquiétude pour la Terre et nos enfants.

Et enfin, la conversation, celle d’un érudit sorti d’une académie de la Renaissance, dissertant avec simplicité et éclat sur les atomes, les étoiles, la grande musique classique ou un tableau de Van Gogh.

Hubert Reeves est le président d’honneur de la grande Agence française pour la biodiversité que nous avons mise en place : c’est une chance pour notre pays, qu’un scientifique de sa hauteur de vue, qu’un homme de bonne volonté aussi engagé ait accepté cette mission et cet office qui m’ont semblé naturellement lui revenir.

Hubert Reeves, comme c’est le cas pour chacune des figures les plus authentiques de la cause environnementale, a fait le chemin de l’émerveillement pour arriver à l’engagement.

L’émerveillement, c’est la curiosité aux proportions d’un univers pour les mystères du cosmos, des atomes et de la naissance de la vie, celle d’un jeune et surdoué étudiant qui aime comme une œuvre d’art les arabesques des équations. Hubert Reeves dit alors : « Savez-vous qu’une équation peut vraiment être belle ? Pas seulement satisfaisante pour l’esprit, mais élégante, comme une calligraphie ou une partition musicale. »

De poète, avec ses chiffres, ses nombres, Reeves se fait romancier : il tente d’écrire le roman vrai de notre univers. Et il le fait lorsqu’il est accepté à la Cornell University, au sein de l’équipe de Hans Bethe, futur prix Nobel, lequel réussit à résoudre cette équation aux milliards d’inconnues : comment le Soleil fait-il pour briller si puissamment et depuis si longtemps… Hans Bethe avait montré dès 1938 que le Soleil agissait comme un gigantesque réacteur thermonucléaire, transformant ses éléments légers en éléments plus lourds, d’où son existence si longue et son rayonnement si inépuisable… Et, à l’orée de ces années 1960, son équipe étudie la façon et le lieu de naissance de tous les éléments de notre univers, atomes et particules, dont nous sommes faits. C’est la genèse des hommes, ces « poussières d’étoiles », pour reprendre le beau titre d’un livre d’Hubert Reeves.

Puis Hubert Reeves impose sa voix, son timbre et son érudition au travers de livres qu’il publie plus tard, Patience dans l’azur et Poussières d’étoiles. « Parce qu’ayant eu la chance d’acquérir un certain savoir je me dois de le mettre au service du bien commun ».

Aussi, c’est à un véritable « J’accuse… ! » qu’Hubert Reeves se livre ; j’accuse, contre le réchauffement climatique ; j’accuse, contre la destruction des paysages et des écosystèmes ; j’accuse, contre la mise à mal de la biodiversité sous le coup de l’action humaine.

Mais c’est un j’accuse où le souci de la planète n’a pas fait disparaître l’amour des hommes, une indignation où la conscience de la vanité des hommes, simples poussières d’étoiles, ne transige pas avec l’admiration pour les fruits du génie humain.

Hubert Reeves s’est engagé sans compter, s’est dépensé sans s’économiser, présidant Humanité et Biodiversité et succédant ainsi à Théodore Monod à la tête de cette fondation d’utilité publique, véritable laboratoire mêlant pensée intellectuelle et action concrète pour préserver la richesse et la diversité des espèces animales et végétales.

Il est cependant resté un très jeune homme, dans sa subtile candeur et son amer souci de la planète ; il ne s’est jamais poussé du col ou n’a jamais voulu céder aux gloires diverses et aux louanges qui l’embarrassent ; il a gardé sa foi et son exaltation d’étudiant génial et de professeur que chacun aurait aimé avoir.

Sa générosité et sa ténacité imposent le respect ; ses passions vibrantes le révèlent fragile et, au fond, intranquille ; sa conversation vous éblouit sans intimider, vous hisse sans assommer jusqu’aux plus hauts points de connaissance et de raisonnement.

Et entre l’enfant admiratif de la majesté des lacs du Québec et cet homme infiniment amoureux des beautés de la terre, il y a un mélange de ferveur et de contemplation, on pourrait dire, pour parler comme lui, qu’il est une « passion dans l’azur »». 

 

  

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